Dernière mise à jour le 18 juin 2020
Avec son accession au pouvoir suite à une élection présidentielle qui aura maintenu le suspens jusqu’au bout, Emmanuel Macron a désormais cinq ans devant lui pour redresser le pays. Une chose est sûre : les banques ont accueilli avec enthousiasme l’élection de l’ancien banquier d’affaire. Le candidat Macron a en effet donné de nombreux gages au secteur financier, et les réformes devraient intervenir assez rapidement au cours du quinquennat. Si toutefois il arrive à convaincre une part suffisante de Français pour constituer une majorité à l’Assemblée Nationale et au Sénat. Dans le cas contraire, Macron pourrait bien avoir les mains liées.
Un quinquennat confiant pour les marchés financiers
Dans les grandes lignes, les promesses du quinquennat Macron ont de quoi rassurer les acteurs et observateurs de l’économie française, et notamment les plus libéraux d’entre eux. Suppression d’emplois publics, baisses d’impôts consenties pour les entreprises et les particuliers, allègements de charges, réforme du Code du Travail afin de faire prévaloir l’accord d’entreprise sur l’accord de secteur ou de branche, … Ces “Macronomics” (expression humoristique dont la parenté appartient à un analyste de Morgan Stanley) sont une véritable bénédiction pour tous les défenseurs du libéralisme économique régulé, du libre-échangisme et de la coopération économique internationale.
La taxe sur les transactions financières (TTF), plus connue sous le nom de “taxe Tobin” (l’économiste keynésien qui l’a longtemps portée) ne sera “pas la priorité” du Président Macron, a-t-il estimé dans un entretien à Libération le 24 mars dernier. Après le coup de frein porté à ce projet par François Hollande, M. Macron ne devrait donc pas rouvrir le débat de si tôt. Cette taxe, très présente dans le débat public suite aux graves crises financières de la décennie, fait très peur au secteur financier, et ce à juste titre. Elle mettrait un coup d’arrêt très fort aux activités spéculatives telles que le trading à haute fréquence, en attaquant directement les marges dégagées.
Autre coup de séduction : l’ancien ministre a fait part de sa volonté d’assouplir les nombreuses règles auxquelles les grandes banques et compagnies d’assurance ont dû se plier suite à la crise des subprimes. Des mesures qui ont “désincité [les établissements bancaires] à financer l’économie”, sous prétexte de réduire les risques de crise systémique. Or, cette position est exactement celle de nombreux lobbies du secteur bancaire. Exit les préoccupations sur la spéculation outrancière, les prêts toxiques, la rigueur budgétaire et leurs effets dévastateurs sur l’économie réelle. Cet assouplissement législatif pourrait aussi bien bénéficier aux grands banques qu’aux plus modestes telles que Boursorama ou ING Direct. Peut-être sera-t-il un moyen pour les plus jeunes néobanques d’accélérer encore leur développement, comme N26 le fait actuellement.
La fiscalité du capital, grand chantier en perspective
Longtemps restée hors des feux des projecteurs, la remise à plat de la fiscalité du capital est une proposition qui pourrait chambouler fortement le marché. Le Président Macron souhaite tout simplement taxer les revenus du capital à hauteur de 30% (prélèvements sociaux inclus). C’est à dire que l’assurance-vie, pourtant mode de placement préféré des Français, est plus ou moins condamnée à long terme. Sachant que ces gains sont déjà taxés à 7,5%, plus 15,5% de prélèvements sociaux, la hausse de l’assiette totale à 30% porterait alourdir encore davantage un système d’assurance-vie déjà à bout de souffle, et décourager de potentiels clients. La France est déjà la championne d’Europe de la taxation des produits d’épargne : elle peut monter jusqu’à 60%, contre 26,4% en Allemagne, 26% en Italie ou 23% en Espagne. Ne parlons même pas de l’exonération des plus-values mobilières au Luxembourg.
La communauté d’experts en gestion de patrimoine appréhende donc cette réforme potentielle et ses effets indésirables. “Un tel alourdissement de la fiscalité risquerait de détourner certains épargnants de l’assurance-vie”, comme l’a rappelé Olivier Rozenfeld, président du cabinet Fidroit.
L’impôt à la source : chimère ou réalité ?
Depuis le temps qu’on en parle, une date a enfin été avancée : le prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source devrait remplacer le recouvrement sur avis d’imposition le 1er janvier 2018. Mais dans les faits, beaucoup d’observateurs s’inquiètent des risques liés aux difficultés techniques qui seront rencontrés … à commencer par le nouveau Président lui-même. La mise en place du prélèvement à la source est un véritable casse-tête à l’échelle d’un pays de 66 millions d’habitants, et beaucoup d’entreprises pourraient être mises gravement en difficulté. En effet, ce sera désormais à elles de recouvrer l’impôt, tâche qui ne fait pas partie de leurs affectations habituelles. Elles devront aussi supporter les surcoûts liés à l’emploi de nouveaux experts comptables et spécialistes financiers. Autant dire que la situation est difficile, et le passage d’un système à l’autre ne peut pas se permettre d’être bâclé.
Le Président Macron ne souhaite pas abroger cette réforme, mais est pleinement conscient des importants risques de désorganisation auxquels les services fiscaux pourraient faire face s’ils ne sont pas suffisamment bien préparés. Une expérimentation sera menée sur une zone géographique ou un pool d’entreprises choisies, avant d’élargir éventuellement la mise en application de la mesure. Cette dernière ne devrait donc pas intervenir avant le 1er janvier 2019, voire plus tard dans le quinquennat.
Conclusion
Les réformes sont évidemment très nombreuses, et nous n’aurons pas le temps de tous les aborder dans un simple article sur BanquesEnLigne.org. Mais l’élection à la Présidence de la République d’un ancien banquier d’affaires et locataire de Bercy est une énorme chance pour le dynamisme du secteur financier. De nombreux éditorialistes politiques et économistes s’accordent à dire que le projet “En Marche !” est ambitieux, mais qu’il peut apporter un vent de libéralisme et de pragmatisme qui ont manqué à la France ces dernières années. Macron souhaite faire du pays une démocratie “flexi-sécuritaire”, sur le modèle de nos amis nordiques dont on vante si souvent la réussite. À terme, peut-être apportera-t-il un peu d’optimisme à une France sclérosée par la surcharge administrative, le chômage et le pessimisme économique dont elle peine à s’extraire.
Mais ce projet n’est pas sans risques pour les acquis sociaux, gagnés à la sueur du front par les syndicats et gouvernements successifs depuis les années 1950. Le Président et son gouvernement vont donc devoir ratisser très large afin de constituer une majorité à l’Assemblée Nationale et au Sénat, pour que le quinquennat soit une réussite.
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